Après la lecture de quelques articles sur la blogosphère, difficile pour moi d'avoir une opinion bien tranchée sur ce débat houleux ; La BM de Lyon vend-elle son âme au diable en confiant la numérisation de 500 000 ouvrages de son fonds ancien à Google, ou bien est elle précurseur de l'utilisation d'un service privé à des fins publiques (donc louables...) ?
Quel est l'objectif de la BM de Lyon ? Rendre accessible en ligne 500 000 livres, aujourd'hui soigneusement rangés dans ses magasins, et accessibles à un petit groupe "élu" de chercheurs, historiens, scientifiques...
A l'énoncé de ce seul objectif, j'applaudis la démarche, et je me réjouis de bientôt pouvoir consulter en ligne ces livres auxquels je n'aurais sans doute jamais eu l'occasion d'accéder sans ce contrat passé avec Google.
Bertrand Callenge le rappelle dans son blog, "l’essentiel de notre métier tient dans l’accès, non dans la possession". Effectivement, si plus d'usagers, ici d'internautes, peuvent accéder à plus de ressources grâce à ce "partenariat", n'a-t-on pas toutes les raisons de se féliciter ? Qui s'est ému, autrement que pour féliciter l'initiative, de la diffusion par la BM de Toulouse de photographies de son fonds ancien sur Flickr ? Voici un site privé, qui vit par ses annonceurs, certes discrets, et qui propose désormais des images tirées du fonds ancien d'une bibliothèque publique.
La valeur ajoutée de telles initiatives est évidente, pour Toulouse un outil de navigation simple dans une partie de son fonds ancien de photographie, allié à une visibilité qu'une mise en ligne exclusive sur le site de la BM ne lui aurait jamais permise. Pour la BM de Lyon, il en est de même ; un accès démultiplié, qui ne nécessite plus de partir de la BM de Lyon, à des ressources aujourd'hui tout simplement "interdites" d'accès au plus grand nombre.
L'objectif de diffusion est bel et bien atteint.
Ceci étant dit, je m'étonne tout de même des "clauses" du contrat passé avec Google ; les copies numériques resteront la propriété de Google (que se passe-t-il si Google rend son accès payant ?), la bibliothèque peut diffuser à son public (quelles restrictions s'appliquent ici ? le public qui fréquente la bibliothèque ? le public inscrit ? le public d'internautes qui se connecte au site de la BM ?) les copies numériques en mode image et non en mode texte, cette seconde diffusion étant réservée exclusivement à Google.
J'ai lu dans un article que l'investissement de Google pour la numérisation des 500 000 documents de la BM de Lyon était estimé à 60 millions d'Euros. Quel ministère ou collectivité territoriale aurait pu financer un tel projet ? La CE, avec le projet de la BnuE, n'apporte aucun soutien financier aux entreprises de numérisation des bibliothèques publiques.
Je m'étonne qu'une démarche plus globale (nationale ? Européenne ?) ne soit pas engagée avec Google, pour qu'une négociation sérieuse, préservant réellement les intérêts publics qui sont en jeu ici, ait lieu. A multiplier les initiatives isolées, comme celle de Lyon, on réduit à l'évidence les marges de manœuvre des bénéficiaires de la numérisation Google. Qu'un groupement de bibliothèques publiques approche Google et construise avec cet opérateur incontournable aujourd'hui un contrat type respectueux des intérêts de chacun, et nous pourrions peut-être ainsi garantir le service public d'accès à nos ressources par le biais d'un opérateur privé qui y retrouvera évidemment ses petits... Le postulat de Jean Noël Jeanneray sur Google books et ses préconisations sont louables, j'y ai pleinement adhéré à la lecture de son livre, mais quel pays en Europe a aujourd'hui décidé de se donner les moyens financiers pour le "sursaut" contre le monopole Google et pour une politique volontariste d'accès numérique aux ressources de nos bibliothèques ?
Lire ici l'article sur le site de la Municipalité de Lyon
7 octobre 2008
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